Il est courant d’entendre parler des catastrophes naturelles de plus en plus fréquentes. Elles ont un impact grave sur la sécurité de la population. On ne peut que penser aux feux de forêt qui ont frappé le Québec lors de l'été 2023, mais également d’autres provinces dont l’Alberta et les Territoires du Nord-Ouest, ou à ceux qui ont fait rage aux îles d’Hawaï. Au-delà de la tragédie climatique et humaine, ces événements catastrophiques entraînent également des répercussions dans notre quotidien, plus précisément, sur la façon dont nous devons apprendre à prévoir le nombre de catastrophes climatiques pouvant survenir.
La nécessité d’une nouvelle approche
Catastrophe Indices and Quantification Inc. (CatIQ), une filiale sur les sinistres catastrophiques au Canada, a publié une étude qui révèle que 2022 a été la troisième année avec le plus de pertes assurées dans l’histoire du Canada. Cette hausse ayant un impact financier considérable, il est devenu de plus en plus pressant que les codes nationaux soient révisés pour de bon. On parle donc ici d’une révision complète de la méthode prévisionnelle des codes suivants: le Code national du bâtiment, le Code canadien de l’électricité et le Code canadien sur le calcul des ponts routiers. Tous sont remis sur la table à dessin. Dans quel but? Développer une résilience accrue face aux changements climatiques.
Cette réforme permettra de mettre à la disposition des concepteurs en bâtiments et en infrastructures de nouveaux codes entièrement basés sur une toute nouvelle approche prévisionnelle. En effet, depuis la création des documents de référence nationaux, les données climatiques de référence permettant d’encadrer le travail des concepteurs sont tirées des données climatiques historiques enregistrées selon les régions. Cela veut donc dire que tous les calculs de résistance établis pour concevoir de nouvelles structures sont basés sur des valeurs antérieures. C’est assez paradoxal, non ? Voilà pourquoi les nouveaux codes nationaux qui seront élaborés n’utiliseront plus cette méthode du passé, mais plutôt des modèles mathématiques représentatifs des données climatiques futures en fonction de prévisions.
La méthode de prévision RCP
Désormais, les nouvelles prévisions se baseront sur des scénarios RCP (Representative Concentration Pathway), signifiant « profils représentatifs d’évolution de concentration » en français. Il s’agit de scénarios futurs plausibles du forçage anthropique, soit les répercussions des activités humaines, d’après diverses combinaisons de prévisions prenant en considération la croissance démographique, l’activité économique, l’intensité énergétique et le développement socioéconomique.
Ces prévisions se manifestent par une approximation de la quantité des gaz à effet de serre (GES) qui sera stockée dans l’atmosphère d’aujourd’hui jusqu’en 2100. L’augmentation du taux de GES stocké se calcule d’après la hausse des températures. En effet, lorsqu’ils s’accumulent, les GES limitent la chaleur pouvant s’évacuer de l'atmosphère. Les prévisions montrent donc une augmentation de ce taux, laquelle résulte d’une hausse des températures, ce qui cause à son tour l’augmentation de la récurrence des catastrophes naturelles.
Saviez-vous que le réchauffement climatique touche davantage les pays nordiques à travers le monde? Le Canada ne fait pas exception à la règle. Des études montrent que la température moyenne du Canada a augmenté de plus du double que la hausse moyenne mondiale depuis 1948. Cette hausse engendre des températures chaudes extrêmes menant à des sécheresses et à des feux de forêt plus récurrents et graves, comme ceux que nous avons vécus au Canada à l'été 2023.
Il a aussi été rapporté que les précipitations ont augmenté en moyenne de 20 % dans l’ensemble du Canada, ce qui augmente considérablement les risques d’inondations. Les températures froides extrêmes sont quant à elles moins fréquentes, ayant comme impact le fait que le nombre de jours de gel et l’épaisseur du couvert neigeux diminuent. Les conceptions en sont ainsi affectées puisque les hausses des températures et des précipitations sont les principaux facteurs qui diminuent la résistance et la durabilité des infrastructures canadiennes. Ces impacts n’iront pas en s'amoindrissant, avec la présente augmentation à laquelle nous faisons face de la fréquence des évènements climatiques extrêmes.
Objectifs de la réforme
Le changement de sources des données climatiques de référence a comme objectif de rendre les prévisions climatiques normales dans la conception des bâtiments et des infrastructures pour regarder vers l’avant plutôt que de miser sur les données antérieures non représentatives du futur.
La modification des codes nationaux a donc pour but de renforcer la résilience des conceptions pour répondre aux objectifs des codes nationaux : la sécurité, la santé, l’accessibilité, la protection du bâtiment contre l’incendie et les dommages structuraux, et l’environnement, tout en réduisant les coûts liés aux dédommagements des sinistres à long terme. Vraisemblablement, cette modification se reflétera dans le domaine de l'assurance par une réduction des sinistres et des dommages causés par des catastrophes naturelles inattendues.
Le réchauffement climatique et l’intérêt de modifier les codes nationaux sont présentement des sujets sensibles dans le domaine de la construction. Cependant, la dernière édition des codes publiés en 2020 ne faisait toujours pas état de la résilience climatique. C’est en 2025 que les codes nationaux incorporeront ces modifications pour la première fois. Il faudrait cependant attendre environ 2030 avant qu’ils ne soient en vigueur. Il en ressort donc que le rythme des modifications aux codes nationaux constitue un problème pour les compagnies d’assurance, car elles font face à une hausse des réclamations qui ne fera que continuer d’augmenter, sans atténuation attendue avant plusieurs années. Il devient donc de plus en plus pressant d’accélérer l’application des nouveaux codes nationaux afin d'augmenter considérablement la résilience aux changements climatiques.
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